PISA : au delà des apparences

dimanche 9 décembre 2007


Les résultats de l’enquête internationale PISA sur les performances du système éducatif sont exploitées en France par les conservateurs pour faire croire à l’écroulement du système éducatif, bien sûr soumis au « laxisme soixantehuitard », « trop ludique », pas assez centré sur les savoirs de base, avec des enseignants qui sont autant de dangereux gauchistes.

Leurs propositions relèvent d’une nostalgie pour le certificat d’étude ou l’école des « choristes ». Ils prônent le retour à l’ordre, au « lire-écrire-compter » et à une concentration des pouvoirs sur les seuls « chefs » d’établissement.

Pourtant, ce type d’enquête très complexe, qui nécessite une longue analyse, interroge de toute autre façon. Et notamment sur l’égalité devant l’école, la résorption de l’échec scolaire, le développement de capacités, toutes choses qui relèvent de nos préoccupations.

Ainsi, les systèmes éducatifs les plus performants sont aussi ceux qui aboutissent à la plus grande homogénéité des résultats des élèves, avec un taux d’échec très faible, et qui orientent le plus tardivement leurs élèves.

Si la transposition telle quelle n’est pas possible, il est intéressant d’analyser la cohérence de chacun, et de projeter ce qui pourrait améliorer le système français.

 PISA mode d’emploi

L’enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) est la 3e menée par l’OCDE (précédentes études en 2000 et en 2003, celle-ci en 2006).

Elle teste près de 400 000 élèves de 15 ans scolarisés dans 57 pays.
Ses résultats sont exprimés en tableaux statistiques arides, ce qui explique que beaucoup d’observateurs en restent aux scores globaux nationaux, d’autant que ça peut les arranger dans leur interprétation caricaturale.

Des analyses plus fouillées peuvent d’ailleurs révéler des surprises :
 alors que l’OCDE, officine néo-libérale, privilégie d’habitude plutôt des thèses élitistes, beaucoup de résultats placent l’analyse sur le terrain de l’égalité devant l’école, l’intégration des immigrés ...

 autre thèse courante : la supériorité du privé. D’après cette étude : « en moyenne, dans l’ensemble de l’OCDE, les élèves d’établissements scolaires privés ont obtenu de meilleurs résultats que les élèves d’établissements publics dans la plupart des pays. Toutefois, la situation est inverse lorsque le contexte socio-économique au niveau des élèves et des établissements a été pris en compte. »
Ce qui pose le problème de l’efficacité de l’enseignement privé face au public vis à vis des élèves de même origine sociale ...

 Les résultats

En 2003, la France se classait 10e en sciences et en 2000, 14e pour la lecture et 13e pour les mathématiques. Cette année, elle se classe au 19e rang pour les sciences et à la 17e place en lecture et en mathématiques, en recul donc, mais pour des performances moyennes.

Les auteurs notent que, dans l’ensemble de l’OCDE, les résultats sont globalement demeurés constants, avec des progrès pour certains pays qui ont engagés des programmes spécifiques.

On touche là aux limites de ce type d’enquête internationale : la forme peut favoriser certains systèmes, et un « bachotage » opportun peut fausser des résultats. Néanmoins, la comparaison dans le temps doit interroger les responsables français.

Ainsi sur les moyens alloués à l’Éducation : la France est depuis 2002 à rebours des tendances internationales puisqu’elle désinvestit alors que les dépenses d’éducation ont augmenté de 39 % en moyenne entre 1995 et 2004 !

Par ailleurs, les « recentrages » sur les méthodes de lecture engagés par les Ferry et Robien ont plutôt dégradé la situation (confirmée par une autre étude : PIRLS 2006) ! L’enquête montre que la proportion d’élèves en difficulté y a augmenté...

 Pour un système éducatif réellement égalitaire

Dans cette enquête apparaissent des axes forts, susceptibles, s’ils sont suivis, d’une orientation vers plus d’égalité :

 « la répartition précoce des élèves par classe selon leur niveau semble accentuer l’influence du milieu socio-économique sur les résultats des élèves » : en clair, la sélection précoce, les filières renforcent les inégalités scolaires. Beau plaidoyer pour le « collège unique », si, bien sûr, les difficultés rencontrées par certains élèves font l’objet d’un traitement spécifique.
Ainsi en Finlande (1re de la classe !), un soutien individualisé est dispensé à 30 % des élèves, l’objectif étant toujours de les réintégrer au plus vite dans le cursus commun.

 « les pays qui réussissent le mieux comme la Finlande ou la Corée sont également ceux qui ont le plus faible nombre d’élèves en grande difficulté scolaire ». Or l’école française crée des écarts de niveaux énormes selon l’origine sociale et ethnique. Ainsi les scores en sciences, maths et lecture sont très différents selon que vos parents sont cols bleus ou blancs. Il y a près de 100 points d’écart, par exemple dans les connaissances en maths entre les enfants de parents ouvriers et cadres. Inégalité aussi ethnique : les résultats en sciences varient de 505 pour les français « de souche » à 456 pour les enfants de la seconde génération et 438 pour la première génération.

 d’autres approches pédagogiques peuvent aussi faire progresser les élèves. Ainsi en Allemagne, pour développer le goût pour les sciences, quelque 250 « laboratoires pour enfants » ont été créés sur tout le territoire.
 L’évaluation en continu des performances des élèves revêt également un caractère crucial. La Suisse a ainsi innové dans ce domaine.
 la réévaluation des enseignants, l’amélioration de leur formation jouent aussi un rôle.

Communiqué de l’OCDE

Synthèse des résultats